Etienne Mineur archives

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jeudi 22 décembre 2005

Histoire du graphisme en France


Viens de paraître il y a un mois: Histoire du graphisme en France de Michel Wlassikoff. Il s'agit donc d'un ouvrage de référence sur le graphisme (et la typo) de 1500 à nos jours. La mise en page est sans surprise (j'ai entendu l'expression "maquette d'éditeur" ;-) et la couve très dure, mais c'est toujours très délicat de designer un livre traitant de graphisme, doit-on être transparent, ou au contraire être revendicatif dans sa maquette ... je crois qu'il n'existe pas de vraie solution.
Par contre l’ouvrage est servi par une magnifique iconographie, même si nous connaissons déjà beaucoup de ces images (j'ai quand même découvert un magnifique livre de Cassandre ; le spectacle est dans la rue.). Cette mise en perspective historique est très révélatrice de la manière dont le graphisme d'"auteur" change de sujet et de pratique dans le temps.
Nous pouvons remarquer la manière dont le graphisme d'auteur change de milieu au cours des décennies. En caricaturant, il passe de l'édition (les années cinquante) vers l'engagement politique (fin 60 et 70), puis vers le culturel (80), vers la musique (90) puis vers la mode (2000) bref il y aura toujours des TAZ (Zone d'Autonomie Temporaire ;-) pour le graphisme d'auteur (j'espère!).

Quelques petites réserves :
l'oubli (volontaire ?) de Philippe Millot, qui est pour moi très important en France en tant que typographe. pourquoi mettre au moins dix images de Laurent Fétis et pas une seule de Philippe Millot?
Et aussi, aucune image de design numérique lié à l'interactivité. C'est étrange de parler de graphisme sans mentionner le design sur écran. On parle un peu d'Etienne Robial pour l'habillage de Canal+ (c'est le minimum), mais rien sur l'interactivité. C'est étonnant de la part de Michel Wlassikoff, peut-être a-t-il eu des pressions de l'éditeur?
C'est dommage, qu'une fois encore le "design écran" en France ne soit pas considéré comme assez noble pour être cité dans ce genre d'ouvrage. Ce n’est pas grave, il y a internet et John Maeda à la fondation Cartier (et aussi dans Libération cette semaine) ;-)
En tout cas c'est un très beau cadeau de noël...

mardi 20 décembre 2005

Les nuits des 22 et 23 décembre...

Les nuits des 22 et 23 décembre 2005, sera débattu le projet de loi DADVSI (Droit de l'Auteur et Droits Voisins dans la Société de l'Information). pour signer la pétition (contre;-) c'est .

vendredi 16 décembre 2005

le grand bêtisier graphique de cette année 2005 suite...

À propos de ces nouveaux logos, je vais essayer de m'expliquer, même si c'est un peu en vrac :

Premièrement, en regardant ces nouveaux logos, ils appartiennent tous (ou presque) à la même catégorie, des formes molles et douces, soit disant à la mode (dans les agences de communication, car la notion de "à la mode" est très subjective ;-).
Tous ces logos ressemblent à des logos de yaourts aux fruits (courbes souples et douces, couleur acidulée…). Ce genre de forme et de vocabulaire graphique marche très bien pour du yaourt dans nos supermarchés, mais pour une entité comme la SNCF ou l'ANPE, je ne suis pas sûr que ce code graphique les reflète bien.

Je ne m'étends pas sur le manque d'originalité des propositions par les agences françaises. Que ce soit Carré noir, Desgrippes, Dragon rouge, plan créatif… toutes les propositions des agences se ressemblent et sont interchangeables (elles sont "tendances";-). On ne peut pas reconnaitre la marque graphique ou créative d'une agence par rapport à une autre. C'est lisse, sans aspérités, sans histoire, sans plaisir, bref une grosse bassine d'eau tiède (référence au film "this is Spinal Tap";-)

Ces images reflètent bien le consensus et les centaines d'heures de réunion entre les services communication et marketing de ces entreprises et des agences. Avec, au bout un graphiste (dans le meilleur des cas) complètement déprimé de faire sa cinquantième proposition (au minimum).

Pour moi un logo ne doit pas être "à la mode" mais refléter l'identité d'une société. Les logos d'entreprises comme la SNCF, les banques… doivent être presque intemporels, ils doivent être reconnaissables et efficaces dans leurs compréhensions. Ils doivent marcher en noir et blanc (et oui je suis de la vieille école).
Bien sûr il faut régulièrement les réajuster (redessiner quelques lignes, actualiser la typo d'accompagnement…) afin de les actualiser (tous les dix ans), mais pas les changer suivant les lubies d'un nouveau directeur voulant poser sa marque et influencé par des agences ne cherchant que le profit immédiat (je caricature, mais je ne pense pas être loin de la vérité).
Il s'agit juste d'une course contre la montre, à celui qui changera le plus souvent de logo, en espérant que ce changement d'image fasse croire aux actionnaires (ou futures actionnaires comme pour EDF, GDF…) que la société est très dynamique. Cela ressemble beaucoup à de la gesticulation graphique.
Personnellement je préfèrerais que la SNCF ne change pas d'image graphique, mais que les TGV soient mieux agencés, que l'ergonomie de leur site web soit amélioré et que leur borne/guichet fonctionne (par exemple), cela permettrait d'améliorer beaucoup plus efficacement l'image de cette société. Que cet argent serve à améliorer les choses à l'intérieur de l'entreprise.
J'imagine la tête d'un employé de la SNCF quand il a vu le prix facturé par l'agence de communication pour le changement de logo de son entreprise, en gros trois mille ans de salaires ;-) je ne suis pas sûr que ce genre de pratique améliore beaucoup le dialogue entre les employés et la direction.

Je ne nie pas qu'il faille réactualiser l'image de marque des sociétés, mais je ne pense pas que changer le logo (s’il est honorable) soit la priorité. Il vaudrait mieux changer la manière d'utiliser le logo, changer ou redessiner la police de caractère d'accompagnement, réactualiser les couleurs de la charte, changer la direction artistique au niveau des choix des images (photos, illustrations…), bref changer et faire évoluer les autres éléments constituant l'identité graphique.

ps : Je n'ose pas parler du prix de la refonte de l’image de l’ANPE, vue le pourcentage du chômage actuellement, c'est une très bonne idée dépenser une fortune dans l'élaboration de ce nouveau logo.

En dessous, l'évolution du logo de la SNCF,
Celui de Roger Tallon était très bien, je ne vois pas pourquoi il a fallu rajouter une flèche rouge (le symbole du dynamisme dans les années quatre-vingt;-). Cette flèche + la barre en dessous étaient un enfer à caser dans les mises en page, les cartes de visites… à cause de la perte d'espace et donc de visibilité de ce logo. En effet cette flèche et cette barre prenaient une place graphique considérable, cette évolution était plutôt un recul en terme de lisibilité et de simplicité. De toute façon quand on commence à rajouter et à complexifier des éléments graphiques sur un logo, c'est très mal parti. un logo se doit être une épure et non pas un tas de signes plus ou moins bien dessinés.
À propos de la dernière version,
Ce logo est peu lisible, compliqué (des ombres sous les typos par exemple) et surtout le dessin des lettres n'est visiblement pas terminé (les courbes et la forme du C par exemple sont particulièrement disgracieuses). Ce qui gêne la lecture et donc son identification immédiate. L'agence a probablement essayé de remédier à ce problème en rajoutant (le vilain mot;-) un bloc de couleur très vive, mais qui ne vient que rajouter de la confusion à l'image.

ps : j'ai travaillé personnellement chez Desgrippes & associés sur les chartes graphiques de la SNCF à cette époque, je suis arrivé après que la création du logo et je devais donc refaire tout les documents de communication (carte de vite, tête de lettre…) avec cette nouvelle image.
Attention je ne regrette rien, et travailler chez Desgrippes & associés a été une très bonne expérience pour moi. Travailler dans une grande agence pour après passer FreeLance c'est une bonne solution (le contraire c'est plus dur;-).


Voici pour moi une petite liste de logos qui restent et resteront. Curieusement ces logos ne proviennent pas d'agence de communication, mais de graphistes/ateliers ayant une démarche d'auteur (assumant des choix graphiques, ayant une démarche propre et originale) :

Le logo A-POC (dessiné par Pascal Roulin en 2000), ci-dessus, est très intelligent, il est simple, très lisible et surtout il fait comprendre la logique de cette marque de vêtement (issue d'Issey Miyake).
En effet le processus de création des vêtements de la marque A-POC se fait par découpage de formes et de contre formes sans coutures (très malin). Vous achetez des vêtements à découper vous-mêmes.
Ce logo, en plus d'être fort graphiquement, est en même temps didactique. Ce qui est parfait pour sa mémorisation et donc son impact.
--> un petit lien vers une animation de ce logo.

L'exemple du logo du musée d’Orsay (ci-dessous) est aussi très parlant. Ce logo créé par Bruno Monguzzi lors de son association avec Visueldesign Jean Widmer, d'une très grande élégance, est un bon exemple de logo réussit pour moi. La preuve, c'est que ce logo est utilisé (et non pas caché en bas à gauche des affiches comme la plupart du temps) par les graphistes dans les affiches du Musée. On peut jouer avec ce logo, le mettre en grand (comme dans l'exemple de l'affiche de Bruno Monguzzi ci-dessous), le réduire, le multiplier… sur une affiche sans aucun problème. Ce logo devient source d'inspiration pour les graphistes, et non pas une contrainte.


Une autre question, pourquoi les logos (et la communication graphique en général) du secteur culturel sont toujours de meilleure qualité que ceux du secteur privé (ou grandes institutions)? Ce n'est pas une question d'argent, car je ne vous apprends rien, on est bien moins payé dans le secteur culturel.
Une des explications plausibles, c'est le problème du brief créatif (je parle comme une agence de pub;-). en effet je pense sincèrement qu'il n'y a pas de bon projet sans bon client.
La rédaction d'un brief par le client est réellement la clé de voûte d'un bon projet et donc d'un résultat de qualité. Les agences ne devraient pas accepter des briefs complètement flous et sans réel objectif. Cela pose aussi la question de la formation des directeurs de communication dans les écoles...

ps : attention, je ne tente pas de donner des leçons, et de me placer au-dessus, j'essaye juste de trouver des explications au triste paysage du graphisme français.

lundi 12 décembre 2005

la spirale.org


Un lien vers le site laspirale.org, le digital mutant E Zine.
J'en profite aussi pour vous signaler un livre; Mutations pop et crash culture de Laurent Coureau sorti en 2004, reprenant les meilleures interviews de ce magazine.
Ce Magazine se présente de cette manière :
Née au début des années 90 de la découverte de la vague techno-industrielle et du mouvement cyberpunk, une mouvance qui associait déjà les technologies de pointe aux contre-cultures les plus déjantées.
Dans ce livre, de nombreux entretiens avec Lisa Palac, R.U Sirius (de Mondo 2000), Mark Frauenfelder (de Boing Boing), Maurice G. Dantec, Costes, les fondateurs du VHEMT un mouvement pour l'extinction de la race humaine ;-) et pleins d'activistes sataniques ... On parle aussi d'extropien, transhumain, piratage informatique, Grrr Girls... bref que du beau monde ;-)

Quelques citations :
"C'est peut-être là qu'il faut chercher un espace de rupture entre culture dominante et contre-culture, vers ce qui est interdit. Aujourd'hui ce qui est interdit, c'est de ne pas générer de profit", Eric Ouzounian.
"Souvenez-vous ! Ce qui n'est pas gratuit n'est pas libre.", de Ron English.
"Tout ce que nous pouvons faire, c'est limiter les dégâts et nous retenir d'ajouter un de nos semblables de plus aux milliards déjà existants." les U. Knight
"Et puis de toute façon, qu'est-ce qui pourrait sérieusement s'opposer à la culture actuelle? Les Mormons ?", Richard Metzger
Toujours Richard Metzger répondant à une question sur la théorie de la conspiration aux USA; "Je n'ai aucune preuve de leur existence. J'ai par contre plein de preuves de l'existence d'une bande d'imbéciles assoiffés de pouvoir. Mais s'ils ne sont pas capables de dissimuler l'existence d'un acte de sexe oral entre deux adultes consentants, comment pourraient-ils nous cacher l'existence de vastes conspirations impliquant des aliens, des bases souterraines et des voyages spatio-temporels?".

À propos des années 90, qui se souvient de Jaron Lanier et des autres technos Gourous du début des années 90 ?
Par contre l'importance des romans de William Gibson est définitive. En effet aussi bien les artistes, scientifiques, graphistes, musiciens, développeurs des années 90... tous citent William Gibson dans leurs interviews.
Le CyberPunk de William Gibson à vraiment modelé notre présent et peut-être notre futur proche. Dès 1984, avec son premier roman Neuromancien, il décrivait une société complètement interconnectée avec un monde virtuel, avec ses mafias, ses hommes politiques, ses grandes sociétés, ses hackers, ses freaks, ses bugs informatiques ...
Les autres grands auteurs CyberPunk sont (si cela vous intéresse) : Bruce Sterling, Pat Cadigan, Michaël Swanwick, Greg Bear... et plus près de nous Neal Stephenson (mon préféré ;-)

dimanche 11 décembre 2005

le magazine VU (1928-1939)


Au cours d'une conférence de Pierre Ponant aux Arts décos de Strasbourg ...
J'ai redécouvert dans son contexte historique (les années 30) le magazine de Lucien Vogel, Vu.
Logo du magazine créé par Cassandre, direction artistique de Alexander Liberman, les principaux photographes étaient André Kertész, Brassaï, Cappa, Lucien Lorelle... bref une incroyable aventure aussi bien au niveau de l'engagement politique (Vu a été le premier magazine français à parler de camps de concentration, du danger d'Hitler...) que sur le plan de la forme.